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#7 Rencontre avec Ingrid et David de La ferme Marine d’Artouan

BBP #7 La Ferme Marine d’Artouan 
Artouan (17)

Bien-Bon faiseurs

 


©Jean-Marie Pedron

Quelle est la genèse de votre projet ?

Ingrid : On a acheté La ferme en 2017. C’est David qui est de formation aquacole. Il a eu différents parcours, tous plus ou moins dans les produits de la mer, et quand on s’est rencontrés, on a voyagé en Asie (on a vécu 8 mois en Thaïlande), et depuis déjà quelques années, ça lui trottait dans la tête, cette idée d’avoir une ferme, de reprendre une cabane. Il n’en avait pas eu encore l’opportunité, mais au fil des années, ça a fait mûrir son projet.

Quand nous sommes revenus d’Asie en avril 2016, David a eu à nouveau cette envie de faire autre chose, et il a commencé à prospecter. Nous sommes tombés sur cette ferme marine d’Artouan, le lieu, qui était une cabane plus réellement exploitée depuis 2 ans. On a racheté cette cabane.

Pour ma part, je suis dans les huîtres et en Charente-Maritime par amour.

 

 

David, qu’est-ce qui t’a donné envie de faire ce métier lié à la mer et quel est ton parcours professionnel ?

David : Dès la 3ème, j’ai bifurqué vers un BEP aquaculture. Après, j’ai toujours été proche de la mer, je fais du surf, de la planche à voile. La passion de la mer était déjà bien ancré depuis longtemps. Pour l’ostréiculture, j’y ai fait des aller-retours juste comme ça, pour l’expérience mais dans ce projet de Là, de ferme aquacole, le projet d’ostréiculture était pour mois plus viable, c’était envisageable, la technique s’apprenait sur le terrain.

 

Parlez-nous de vos produits ?

Nous, déjà, dès le départ, on a souhaité que ce soient des huîtres naturelles, donc nées en mer. On s’est très rapidement rapprochés de l’association ostréiculteurs traditionnels qui revendique ce travail et ce savoir-faire, et aussi l’étiquetage des huîtres nées en mer. Nous, c’est surtout aussi dans nos valeurs, dans notre façon de vivre, avant même d’avoir la ferme, on était déjà attentifs à notre consommation alimentaire, on mangeait bio, on faisait attention à la provenance des aliments. Je crois aussi que le fait d’avoir eu un enfant nous a encore plus donné l’envie de s’engager dedans.

 

Pour moi (Ingrid), c’est ça en tout cas, ça a vraiment accéléré les choses. Et après, la ferme, quand on vient ici, ça ne peut donner qu’envie de protéger la biodiversité, et de s’investir. Je pense qu’au fur et à mesure, on a travaillé sur cet aspect de biodiversité, on s’est rapprochés de Nature et Progrès, on est labellisés, on a la mention Nature et Progrès. Du coup, avec eux, on apprend à protéger nos lieux, et à améliorer ce qu’on peut faire par rapport à la biodiversité. Nos huîtres sont naturelles, avec la mention Nature et Progrès. Par contre, nos crevettes, elles ne sont pas bio, elles n’ont pas de label ni la mention, mais par contre, on est en aquaculture extensif. On ne nourrit pas le milieu, ce sont des crevettes produites en petite quantité, et les larves sont locales. Voilà ce que l’on peut dire sur les produits.

David : Il y a aussi l’idée de la ferme marine, de développer aussi pas uniquement ce qui est aquapôle, mais développer aussi un potager, voir comment ça peut pousser tout en développant des techniques. Tu parlais tout à l’heure de permaculture, on n’est pas encore là-dessus, mais on est sur l’observation du milieu. En tant qu’humains, forcément, on exploite la terre, mais c’est essayer d’avoir un impact moindre, donc de manière négative en fait.

On ne travaille pas avec la nature, on essaie d’être en symbiose avec la nature.

 

Nous, ce qui fait notre travail, c’est l’environnement dans lequel on est, qui est naturel. Si on le détériore, il y a de forts risques, à court et moyen terme, que la productivité ne soit plus la même.

Déjà en Bretagne, les ostréiculteurs sont en train de dire que la qualité de l’eau des bassins versants est en train d’appauvrir les nouvelles productions des huîtres. Ce qui sort notre production, c’est la nature. Si on l’endommage, je ne vois pas l’intérêt.

 

Je voudrais qu’on explique aux lecteurs qu’est-ce qu’affiner une huître, et comment on affine une huître, avec tout le processus.

David : Le but d’affiner des huîtres, c’est exactement comme affiner du fromage, c’est leur donner plus de caractère. On achète des huîtres de pleine mer qui sont quand même très iodées, on les introduit effectivement à des périodes où les claires sont iodées, mais au fil du temps, avec 2-3 mois d’affinage, on arrive à obtenir des huîtres très charnues, et on s’aperçoit que plus les huîtres sont charnues, plus elles passent de temps dans les claires, plus la variété des goûts est importante. On arrive avec des huîtres au caractère très prononcé. On a des longueurs en bouche qui sont plus longues, on a de la mache, et il n’y a pas le goût iodé qui apparaît à l’attaque, c’est plus un goût plus carné, on dira.

C’est ce qui fait, comme tu disais tout à l’heure, par rapport à nos futurs clients, c’est le goût de notre savoir-faire, c’est vraiment la typicité de nos claires, la richesse du sédiment, qui fait ce goût-là. En plus de notre travail, mais c’est aussi le milieu.

 

Et alors, pour les crevettes, comment ça se passe pour les élever ?

Pour les crevettes, nous, on n’a qu’un cycle annuel. C’est lié au fait que les températures en période estivale sont intéressantes pour cette crevette-là, parce que c’est une crevette tropicale. Donc les claires, on arrive à monter à une température de 26 degrés. Pour elles c’est très bien. Et comme, naturellement, il y avait déjà de la nourriture dans les sédiments, elles se développent parfaitement. Après, arrivé à fin octobre / début novembre, elles ont leur rythme biologique qui diminue, parce qu’il fait trop froid, et que ce n’est pas leurs conditions de vie. Donc on ne fait qu’inciter.

C’est-à-dire que mi-juin, on les introduit, jusqu’à octobre.

Et donc là, elles grandissent, et ensuite vous les pêchez. Comment vous les pêchez ?

On les pêche au ver d’eau. C’est un filet droit, comme une nasse. Souvent, les êtres qui vivent en mer, quand ils sont confrontés à un obstacle, ils le longent, et ils se font prendre dans une nasse. C’est un filet avec des rayons qui diminuent, et ils se font bloquer.

 

En quoi consiste concrètement votre métier ?

Affineur, pour les huîtres, c’est introduire des huîtres dans des claires, qui est un environnement marin mais très différent de l’eau de mer, et ça permet d’obtenir des saveurs différentes pour les huîtres.

Ok, et pour les crevettes ?

Les mettre en claire, ensuite elles poussent dès qu’elles font 20 grammes on les pêche.

 

Au quotidien, quelles sont vos tâches principales ?

Introduire les huîtres, les sortir pour les nettoyer, les calibrer, on les remet à l’eau pour finir d’affinage, on stocke les huîtres, on prépare les huîtres pour les commandes, on fait l’emballage, on expédie. On entretient le marais, et on fait des visites.

 


© Julien Dumas

Où peut-on retrouver et acheter vos produits ?

À la ferme à Artouan (en Charente-Maritime), nous sommes toujours très heureux d’accueillir nos clients pour leur faire découvrir notre savoir-faire et nos produits.

Après, on fait des livraisons en local, pour un peu de volume, et on vend principalement pour la restauration à Paris.

Vous pouvez aussi retrouver nos produits chez Poissecaille.

 

Vouliez-vous ajouter quelque chose sur votre métier et/ou produit ?

Ingrid : Moi, ce que je voulais dire aussi, c’est sur la consommation.

Pour que nous, petits producteurs, on existe, il faut que le consommateur soit acteur. On parle du bien-manger, du mieux-manger mais il faut vraiment qu’il y est une prise de conscience. Si on veut encore manger des bonnes choses de bons petits producteurs, il faut s’engager et ça passe aussi par un prix, le prix des bonnes choses. Venez voir les producteurs, posez des questions, venez découvrir comment ils travaillent. Dites-vous que derrière ce que vous mangez, derrière un produit, il y a des personnes qui produisent beaucoup de travail et que ce travail doit être justement rémunéré. C’est la seule manière pour que nous, petits producteurs, on continue à exister.

 

Sinon, à part les huîtres, dans la vie, vous aimez quoi d’autre ?

Ingrid : Le bon chocolat noir.
David : Les sports nautiques. Mais l’ostréiculture ne laisse pas beaucoup de temps aux sports nautiques.

Sinon, voyager ! Et on aime bien tout ce qui est créatif, artistique, la cuisine, et rencontrer des gens. On ne voyage plus beaucoup, mais les gens viennent à nous.

 

Q/R du tac au tac !

Huîtres, numéro 4 ou numéro 2 ? 4 / 2.
Fines de claire ou spéciales ? Spéciales / spéciales.
Une recette d’huîtres originale ? Nature / J’en ai plein, je trouve qu’avec les fruits, les agrumes, c’est très bien, les fleurs aussi, avec les herbes. Ma préférée, c’est quand même huîtres pamplemousse ou clémentine.
Crevette avec de la mayo ou du beurre ? Les deux / Nature.
Et les huîtres, vinaigre échalote ou citron ? Ni l’un ni l’autre, surtout pas. Du beurre, oui, mais pour moi, les huîtres, il faut sortir des sentiers battus.

 

Ne le perdez pas de vue !

Retrouvez Ingrid et David à La Ferme Marine Artouan sur Facebook et Instagram et sur leur site.
Une petite visite ? Si vous avez envie de découvrir leur savoir-faire et d’en savoir plus sur l’affinage des huitres en claires, ils organisent sur rendez-vous des visites de la Ferme ! Je vous conseille